Arrivé le 25 juillet 2022 à 23h à l’aéroport international de Nsimalen, le président français a achevé sa visite officielle au Cameroun ce mardi soir. C’est à 22h38 min ce 26 juillet 2022 que Emmanuel Macron s’en est allé à bord de son avion Air France. Invité par le président de la république du Cameroun Paul Biya, il s’agit du premier voyage de Emmanuel Macron depuis sa réélection au mois d’avril dernier pour un deuxième mandat au Palais de l’Elysée.
Arrivé au Bénin ce matin, le président français a entamé sa tournée subsaharienne par le Cameroun, un pays qui entretient de vieilles relations avec la France, depuis 1960. Depuis plus de six décennies les deux pays entretiennent des relations mutuellement bénéfiques. La visite du président français est intervenue dans un contexte international particulier dans un monde marqué par les effets néfastes de la crise sanitaire liée à la pandémie du Covid 19 et la guerre contre la Russie et l’Ukraine.
Reçu par le chef de l’État Paul Biya au Palais de l’Unité, les deux présidents de la république ont profité de l’occasion pour revisiter les relations bilatérales entre le Cameroun et la France.
CONFERENCE DE PRESSE AU PALAIS DE L’UNITE
Ensuite les deux hommes ont tenu une conférence de presse pour édifier les journalistes sur les enjeux de l’heure. Les journalistes français comme à l’époque de François Hollande en juillet 2015, se sont interrogés sur la longévité de Paul Biya au pouvoir. Amélie Tulet de Radio France International (RFI) pose la question au président camerounais : « Espérez-vous briguer un nouveau mandat en 2025 ou souhaitez-vous qu’une nouvelle génération porte les couleurs du RDPC à l’élection présidentielle? » A l’homme Lion de répondre : « Comme vous le savez, le Cameroun est dirigé conformément à sa Constitution. D’après cette Constitution, le mandat que je mène à une durée de sept ans. Alors essayez de faire la soustraction, 7- 4 ou 3 et vous verrez combien de temps il me reste pour diriger le pays. Mais autrement quand ce mandat arrivera à expiration, vous serez informée sur le point de savoir si je reste au pouvoir ou si je m’en vais au village ».
Autre question qui a embarrassé le président camerounais qui en fait n’a pas du tout voulu répondre est celle de la journaliste de France 3, Christelle Méral : « Monsieur le président Biya, le Cameroun a noué un partenariat de défense avec la Russie. Est-ce que la guerre en Ukraine a des conséquences concrètes pour les camerounais? Est-ce que vous condamnez l’intervention russe en Ukraine? Sur le plan économique des entreprises françaises représentaient 40% de l’économie du Cameroun voilà une trentaine d’années et aujourd’hui c’est seulement 10%, êtes vous favorable que la France retrouve une plus large part? ». Il a fallu qu’elle se répète à trois reprises car le chef de l’État a passé le temps à dire qu’il ne comprenait pas cette question mais il a fini par répondre avec l’intervention de Emmanuel Macron : « Eh bien madame le Cameroun entretient des relations diplomatiques avec la Russie mais aussi avec beaucoup d’autres pays. L’Allemagne, l’Espagne, la Chine, le Brésil…Et s’agissant de la relation avec la Russie, elle est ancienne et nous avions signé avec ce pays un accord de coopération qui était arrivé à expiration. On l’a renouvelé et nous avons signé. Le voyage de mon ministre en Russie n’avait pas de rapport avec la situation de la guerre en Ukraine, nous avons l’habitude de signer des accords de ce genre et en Afrique il y a beaucoup de pays qui ont des accords avec la Russie. Donc c’était un acte dans la routine des relations diplomatiques entre nos deux pays. On a pensé peut-être qu’on allait apporter un concours à la Russie, je crois qu’elle n’a pas besoin de l’apport du Cameroun. Il s’agissait tout simplement de renouveler l’accord préexistant. Tout cela est normal, les gens sont évidemment préoccupés par la guerre d’Ukraine. Nous n’avons pas abordé ce problème et il n’était pas question pour nous de l’aborder. Il est vrai que le Cameroun commence à subir les effets de cette guerre, et à cette inflation galopante qui arrive, il y a des difficultés de transport et il y a l’anxiété des gens, on ne sait pas de quoi demain sera fait. Le Cameroun fera ce qui est e son pouvoir pour hâter la fin de ce conflit et qu’on en vienne à la négociation et au retour de la paix ».
D’autres questions ont été posées aux deux présidents, chacun a répondu selon son idéologie au cours de cette conférence de presse.
VERS LA RECONNAISSANCE DES EXACTIONS COMMISES PAR LA FRANCE
L’histoire, la culture et le patrimoine culturel du Cameroun ont également été passés au crible lors de la visite de Emmanuel Macron. L’artiste – musicien Blick Bassy a convenu la nécessité pour la France de reconnaître les exactions commises durant la période coloniale notamment celle relative à l’assassinat des figures historiques de la vie politique telles que Ruben Um Nyobe, Félix Roland Moumié pour ne citer que ceux-là. Des hommes comme Um Nyobe, Rudolph Douala Manga Bell, Abel Kingue, Ossende Afana, Ernest Ouandié dont leur vie a été ôtée dans des conditions atroces et déshumanisantes par les colons français. Blick Bassy au cours d’un exposé fait au village Noah à Yaoundé devant le président français propose la construction des œuvres d’art dédiées à ces symboles historiques du nationalisme ayant lutté pour les indépendances dans l’optique des traumatismes vécus par le passé.
En fait, s’inspirant de l’histoire de la décolonisation et des indépendances du Cameroun, les panélistes ont réfléchi sur la création d’une commission pluridisciplinaire constituée de nombreux scientifiques devant travailler à l’identification des archives au répertoire des lieux de mémoires, y compris des lieux de répression et d’exécution des martyrs. Dans les prochains jours il serait souhaitable d’organiser la collaboration franco-camerounaise en termes de recherches scientifiques et de créer des programmes de recherche conjoints pour contribuer à la mutualisation des compétences en s’assurant de l’accessibilité aux archives et les ouvrir aux chercheurs qui vont faire un travail historique et scientifique.
Une visite officielle du président français qui a duré à peine 24h, mais on ose croire que l’essentiel a été dit, une mission accomplie pour les deux pays qui ont davantage renforcé leur coopération bilatérale. Une relation dynamique et diversifiée car le Cameroun occupe une place particulière dans la relation avec la France et les états africains du fait entre autres du destin de cette nation, de sa position géographique et stratégique au cœur de l’Afrique, de ses atouts naturels, économiques et sociologiques, culturels et sportifs, sans oublier sa population dense et intelligente.
Il ne reste plus qu’à souhaiter que les relations diplomatiques et politiques fortement ancrées entre la France et le Cameroun se poursuivent encore pendant de longues années, surtout qu »elles soient franches et sincères.