Les peuples autochtones du Cameroun vivent des difficultés presque similaires mais connaissent des réalités diverses. Leurs modes de vie diffèrent considérablement de ceux de la société dominante ; leurs cultures sont menacées au point de l’extinction dans certains cas ; leurs modes de vie particuliers dépendent de la reconnaissance de leurs droits et de l’accès à leurs terres et à leurs ressources naturelles traditionnelles.
Les peuples autochtones souffrent de discrimination dans la mesure où ils sont considérés comme étant moins développés et moins avancés que les groupes plus dominants de la société, ils vivent souvent dans des zones inaccessibles, sur le plan géographique ils sont isolés, souffrent de diverses formes de marginalisation tant politique que sociale. Ils font souvent l’objet de domination et d’exploitation à l’intérieur des structures politiques et économiques qui sont communément conçues pour refléter les intérêts et les activités de la majorité nationale.
Au Cameroun, les peuples de la Forêt sont les Baka, les Bakola ou Bagyéli et les Bedzang. Traditionnellement nomades, ces individus vivent de la chasse et de la cueillette, mais ils sont aujourd’hui limités dans leurs activités du fait de la pression qu’ils subissent sur leurs terres ancestrales due à l’exploitation forestière et minière, ainsi qu’aux activités de conservation et d’agrobusiness.
Lerys Crispel Nyangono, étudiant en Master 2 DPR à l’Université de Yaoundé II, SOA est Baka. Son village Zoulabot est situé à 5 km de l’arrondissement de Mintom, dans le département du Dja-et-Lobo, région du Sud. On compte 30 campements de ce côté soit 15 à 30 personnes dans un campement. Il s’est confié à actu24.info : « En matière foncière, nous avons beaucoup de problèmes, nous n’avons pas de terre pourtant nous sommes nés en brousse. L’Etat nous a fait sortir de la brousse pour nous installer où résidaient déjà d’autres populations qui sont les bantous qui occupaient déjà ces terres. Nous voilà dans les problèmes car on nous installe sur les terres des Bantous. D’après la coutume et la tradition camerounaise, les terres appartiennent aux premiers occupants. Nous qui venons après, on ne peut pas nous considérer. Nous n’avons pas d’autonomie, ce qui créé la misère au sein de notre communauté, nous n’avons pas de terre, nous ne pouvons pas jouir des espaces à nous attribués. Si je veux faire un petit champ sur deux hectares, le bantou va m’expulser car il me rappellera que c’est la terre de ses ancêtres, qu’il nous loge juste ».
Solange Ngo Bakoume vit à Kilombo dans l’arrondissement de Lokoundje département de l’Océan à 26 kilomètres de Kribi, dans la région du Sud. Selon ses dires, les problèmes fonciers que les peuples autochtones rencontrent, ne les surprend plus : « Nous sommes envahis par les projets et les bantous, on vit comme les oiseaux. Quand l’État envisage les projets d’envergure, il oublie que les populations autochtones vivent sur les lieux, du coup nous sommes déstabilisées, notre avis ne compte pas. Nous sommes là sans terre, pourchassées de tous les côtés, nous ne pouvons rien faire pourtant la terre c’est notre vie, notre pharmacopée, notre pharmacie ».
Comment peuvent-ils donc être autonomes ? D’où les multiples déplacements de ces peuples autochtones, qui se retrouvent sans domicile fixe. Le doigt accusateur est pointé sur l’Etat car lorsqu’il veut développer un secteur occupé par les populations autochtones, elles sont tout simplement expulsées. Prenons le cas de Kribi à Lolabé, les pygmées ont été recasés par le gouvernement.
Concernant les conflits avec les chefs, l’homme Baka, Bagyéli ou Bedzang est embarrassé car on ne tient pas compte de leurs propos. Le chef s’entretient avec le sous-préfet, tirent leurs conclusions et informent juste ces derniers. Ce qui n’est pas normal lorsqu’on sait que 95% des campements des pygmées n’ont pas de chefs, ces campements sont assujettis par l’autorité traditionnelle des bantous.
La solution de ces peuples autochtones pourrait être un plaidoyer, une recommandation sur l’amélioration de la législation foncière du Cameroun. Une réforme foncière est d’ailleurs en cours, la loi devrait prendre en compte les spécificités des populations autochtones. Si la loi reconnait leur mode de vie, la loi sera favorable à leur mode de vie, elles pourront ainsi jouir de toutes les prérogatives comme tout le monde.
Les hauts cadres de l’État doivent conscientiser les administrateurs locaux afin que les administrateurs puissent reconnaître la voie des populations autochtones dans les procédures locales à l’instar de la commission consultative. Les administrateurs locaux doivent considérer la présence des populations autochtones pour respecter leurs droits fonciers, reconnaître qu’ils sont des êtres humains, des citoyens camerounais mais surtout jouir de la notion de légalité entre les citoyens. Dans les prises de décision, le gouvernement doit impliquer les leaders des associations des peuples autochtones en vue de sensibiliser leurs différentes communautés pour le bien de tous.